Je me réveille vers 6h30, suivi par Artémis qui est une lève tôt. Je descends prês du fleuve pour ne pas réveiller le reste de la famille., Quelques moustiques en profitent pour que je leur serve de petit déjeuner.

Les villageois viennent peu à peu faire la toilette dans le fleuve. Une partie du groupe suivra.

Avec Artémis nous donnons un coup de main pour préparer le petit déjeuner. Séké cueille juste à côté du carbet un énorme pamplemousse et le pèle. Il y a au moins 2 cm d'épaisseur de peau. Une fois bien pelé, les quartiers sont séparés un a un pour le petit déjeuner.

Après ce premier repas, Séké nous propose de visiter son village. Le capitaine est sa grand mère, sa santé décline et il faudra désigner un nouveau capitaine. Le village est structuré par quartier en fonction des branches de la famille. La polygamie fait que les femmes d'un même homme habitent chacune dans une maison différente avec leurs enfants. Elles sont cependant regroupées dans le même quartier.Séké nous montre aussi les cultures comme l'arachide mêlée au maïs. Il precise qu'ici aucun produit phytosanitaire n'est utilisé. Ils pratiquent la culture sur brûlis. L'arrachide passé au pilon donne le beurre de cacahuète.Nous plions nos affaires et chargeons la pirogue vers la destination la plus éloignée, l'abatti cotica. Cette partie du voyage voit les sauts se succéder et le parcours sur le fleuve être très technique pour nos piroguiers.

Un premier arrêt pour des courses se fait à Grand Santi, a côté d'une pirogue où un gamin défait du poisson. Je le prends en photo avec son accord.Une partie du groupe descend. Deux hommes arrivent, bières à la main, sur un scooter avec un gros haut-parleur dont le son est très élevé. Il diffuse des musiques festives locales ou arrangées à la mode d'ici. Le groupe se met à danser de concert sur le débarcadère.

Les courses faites, nous repartons sur le fleuve jusqu'à un village où il y a un dispensaire, côté français.Au passage, je relève un panneau d'enseigne qu'on ne voit pas en pays montcellien.

Dans ce village Séké veut nous montrer le travail d'un homme qui fabrique des pilons en bois Kopi qui est très dur et très lourd. C'est un travail d'orfèvre dont l'art se transmet de génération en génération. Aujourd'hui le gros œuvre s'opère avec une tronçonneuse

Le pilon final est très lourd: les costauds du groupe ont essayé chacun leur tour de le soulever vainement.

Une pirogue à l'ancienne, non prévue pour être motorisée est sous un abris a côté

Nous rejoignons pour le repas de midi un village au Suriname. L'accueil est un peu particulier car des garimperos, orpailleurs bresiliens s'y sont installés pour aller exploiter clandestinement sur le territoire français des sites cachés au milieu de la forêt. Ils veulent être pris en photos en compagnie d'amis français pour envoyer à leur famille. Un jeune visiblement éméché nous raconte qu'il a été arrêté par des gendarmes et amené à la brigade menotté.Des quads munis de chaînes leur servent pour rejoindre leur exploitation clandestine a travers la forêt. Il leur font traverser le fleuve sur des pirogues à l'aller et au retour, échappant ainsi à la destruction du matériel et à l'arrestation quand leur camp est découvert.

Nous prenons notre repas sur un carbet où 3 adolescents sont absorbés par un écran de télévision qui diffuse des épisodes d'une serie d'action se déroulant dans la jungle où les armes ont les plus longues tirades à énoncer et la violence gratuite est mis en spectacle de façon consternante.

Ceux du groupe défient leurs aînés au babyfoot.

Nous nous rendons, par un dédale de bras entre les îles, en franchissant quelques sauts, dans un village amérindien.Nous empreintons un chemin raide et glissant pour atteindre un surplomb sur lequel le village est construit. De là une vue superbe sur le fleuve tire les portables des officionados de la photo de leur léthargie intermittente.Les villageois pratiquent l'artisanat d'art. Tissage et fabrication de bijoux obtiennent un franc succès auprès du groupe. Les affaires ont bien marché.

Le capitaine nous fait goûter sa récente production de cachiri ou "bière de manioc". Le goût de fermenté et le léger piquant rappellent le vin bourru de chez nous mais le goût est moins agréable, du moins, selon moi. Tout le monde boit dans le même bol. Les recommandations anti COVID n'arrivent pas jusque là et le respect et la politesse vis à vis de nos hôtes s'imposent. Avant de quitter les lieux un autre point de vue sur un saut infranchissable à cet endroit est proposé à nos objectifs.La suite du trajet est une succession de sauts de plus en plus rapprochés, de labyrinthe de bras , de zones rocheuses accidentées mettant à l'épreuve la science et la dextérité des piroguiers.Nous arrivons à destination après une longue navigation technique et difficile.Le décor à l'arrivée en vaut la peine.

Notre installation pour la nuit en carbet terre battue ainsi que les WC sont des plus rustiques. La toilette se fait dans le fleuve. Avec la crise, l'îlet où se trouve l'abatti cotica est réduit à peau de chagrin et une bonne partie est très boueuse. Par contre le décor est somptueux et un bar est ouvert.Deux hommes gardent les lieux, le propriétaire habite ailleurs. Ils sont âgés et fument la gangeat du matin au soir.Une fois installé, je remarque Ouido en train de vider et écailler du poisson. Je m'approche pour voir de quoi il s'agit : il y a trois sortes de poissons mai je suis surtout attiré par les mythiques pyranhas et leurs dents

Il y a aussi d'autres prédateurs moins dentés proies des premiers, proche de notre brochet.Et des poissons suceurs qui broutent les végétaux sur les pierres et servent de repas aux deux précédents. Les pyranhas du Maroni sont différents de ceux de l'Amazone, ils ne s'attaquent pas aux humains. Ce sont eux qui se font dévorer par nos congénères. D'ailleurs j'en ai goûter un peu au cours du repas, c'est assez fin. Pour les pêcher on met du poulet cru sur un ameçon ou alors on utilise un filet.

Le coucher de soleil, pris depuis le bar où j'ai payé ma tournée pour avoir fait faire demi-tour à la pirogue après le repas de midi, croyant avoir perdu mes lunettes qui s'avéraient être sous mon chapeau, sur ma tête, précède un repas animé et convivial où tout le monde s'est mélangé, estompant le découpage tribal du départ, dans la joie et la bonne humeur.Le repas concocté par Ouido ( poulet riz à la noix de coco) est délicieux comme à chaque fois. C'est un homme plein de talents( cuisinier, chanteur, piroguier)La nuit au carbet ne s'avère pas très reposante, les fruits de l'arbre sous lequel il se trouve, bombardent par intermittence la tôle ondulée du toit me réveillant en sursaut à chaque impacte.